Axes de recherche de la Faculté Libre d'Études Politiques et en Économie Solidaire
La Faculté Libre d’Études Politiques et d’Économie Solidaire (FLEPES-INITIATIVES) est un espace d’enseignement, de formation et de recherche, organisé autour de deux pôles scientifiques qui articulent des enjeux politiques, économiques et sociaux.
Le Pôle 1, “Liberté d’association, économie sociale et gouvernance territoriale” analyse les fondements de l’autonomie sociale, ancrant l’économie solidaire dans les principes de libre association. Ce pôle explore les principes fondateurs de la liberté d’association et de la gouvernance locale, exprimée par les principes du mutuellisme, du fédéralisme, ou encore de l’autonomie municipale. Il s’agit d’examiner comment les formes associatives, mutualistes et coopératives participent à la structuration des solidarités contemporaines, tout en préservant l’autonomie, la liberté des individus et des collectifs.
Si le premier pôle s’intéresse particulièrement à l’autonomisation des individus au sein des organisations collectives dans les cadres démocratiques, le second pôle de la FLEPES oriente ce questionnement vers les secteurs professionnels de l’action sociale et solidaire. Ses actrices et acteurs participent à l’autonomisation des personnes accompagnées et favorise la participation sur les territoires dans un contexte de mutation sociale et des secteurs professionnels.
Au regard de cette complexité, notre deuxième pôle interroge les tensions éthiques qui traversent l’intervention sociale et solidaire. Le Pôle 2, “Ethique et vulnérabilité dans les champs professionnels de l’action sociale et solidaire”, étudie les transformations contemporaines du travail social et de l’économie sociale et solidaire (ESS). Il explore l’accompagnement des publics en situation de précarité, la transformation des pratiques et la place de la réflexivité. L’accent est mis sur les processus de vulnérabilisation et leur impact sur le lien social, les identités et les formes de participation. Trois axes structurent ce pôle : l’étude du lien social et des vulnérabilités dans les pratiques d’accompagnement et les projets solidaires, l’analyse des dilemmes éthiques et des tensions liées aux transformations professionnelles, et la recherche-action comme la co-construction des savoirs en lien avec les pratiques professionnelles, les territoires et les dynamiques locales.
Pôle 1 : Liberté d’association, économie sociale et gouvernance territoriale
Responsable : Nathanaël Colin-Jaeger
Les problèmes fondateurs de ce pôle sont les suivants: comment organiser les institutions et la gouvernance territoriale à partir des principes de la liberté d’association et de l’autonomie? Quels sont les arguments théoriques et empiriques supportant les expérimentations et initiatives locales? Comment défendre l’autonomie fiscale et politique des territoires, notamment au niveau des municipalités ?
En posant ces problèmes au niveau conceptuel et pratique, ce pôle entend inviter à la collaboration entre différentes perspectives, venant de la philosophie politique et sociale, de l’économie politique et du droit. Ce pôle se décompose en trois axes. L’axe 1 se concentre sur les questions relatives à la liberté d’association et la diversité des formes politiques et juridiques que peuvent prendre les associations en résultant. L’axe 2 travaille particulièrement la question de l’autonomie territoriale, en exemplifiant cette dimension aussi bien par un travail portant sur le fédéralisme et la décentralisation, que par une exploration du municipalisme et de l’autonomie fiscale. Enfin, l’axe 3 se concentre sur un des aspects de l’autonomie via la question de l’autonomie fiscale à partir de l’étude du partage du foncier dans une perspective georgiste, en développant les aspects normatifs et empiriques de cette approche.
Axe 1 : Fondements théoriques de la liberté d’association, du mutuellisme et de la gouvernance sociale
Origines philosophiques et juridiques de la liberté d’association : d’où vient la défense de la liberté d’association et quelles sont ses assises normatives ? Quelle théorie plus générale est compatible avec une telle défense ? S’agit-il exclusivement du libéralisme, ou bien peut-on développer une théorie solidariste ou socialiste de la libre association ?
L’association comme outil d’émancipation et d’autonomie : comment les groupes sociaux se structurent-ils pour répondre à leurs besoins de manière autonome ? Quelle est la relation entre la libre association et la justice sociale ? La libre association peut-elle remplacer, par ses effets, l’intervention de l’Etat ?
Démocratie économique et gouvernance participative : comment concilier efficacité économique et principes démocratiques au sein des organisations collectives ? Quelles sont les avantages et limites des cadres démocratiques de gouvernance au sein des entreprises ou des associations ?
Expériences historiques et contemporaines : comment analyser les cas de succès et d’échecs dans le développement de structures mutualistes et coopératives ? En quoi ces expériences contribuent-elles à enrichir les pratiques actuelles ?
Les nouvelles formes d’économie sociale : comment interroger les nouvelles formes d'économie sociale comme les entreprises à mission, les coopératives de plateformes, les circuits courts solidaires ? Comment prendre en considération les innovations contemporaines, notamment au sein de la finance solidaire ?
Cadres législatifs et politiques publiques : quels dispositifs facilitent ou entravent le déploiement des structures économiques alternatives ?
Travaux au sein de cet axe : Nathanaël Colin-Jaeger, 2024, « La justice sociale requiert-elle l’Etat ? Une critique de l’hypothèse étatiste sur la justice sociale », Document de travail, disponible : https://shs.hal.science/halshs-04694727/document.
Nathanaël Colin-Jaeger, 2024. « Libre d’opprimer ? Le libéralisme classique face aux normes sociales nocives », Document de Travail.
Axe 2 : Expérimentations et initiatives locales
Cet axe interroge les conditions et les enjeux de l’autonomie des unités locales, qu’il s’agisse de communes, de régions ou de collectifs territoriaux. Il s’agit d’explorer comment le fédéralisme, les initiatives locales et l’expérimentation politique permettent de repenser la gouvernance et la démocratie à plusieurs échelles.
Théories du fédéralisme et de la décentralisation : comment différents modèles (confédéralisme, subsidiarité, autonomisme, sécession) peuvent être justifiés, et quels sont leurs soubassements normatifs ?
Le rôle des collectivités locales dans la prise de décision : quelle est l’échelle pertinente pour l’autonomie ? Quel rôle peuvent jouer les municipalités ? Quelles doivent être leur autonomie fiscale ?
Etude comparative de l’autonomie locale : comment comparer et évaluer les succès et échecs des villes et de régions ayant mis en place des systèmes d’autogouvernement ou des formes participatives de gestion publique ?
Laboratoires de démocratie locale : quelles sont les initiatives qui favorisent l’implication citoyenne (budgets participatifs, conventions citoyennes, assemblées locales) ?
L’autonomie économique des territoires : comment les monnaies locales et les coopératives territoriales participent-ils à l’indépendance des unités locales ?
Interactions entre autonomie locale et institutions centrales : dans quelle mesure les politiques locales peuvent-elles influencer les politiques nationales et internationales ? Comment faire remonter la connaissance locale expérimentée au niveau du centre politique ?
Axe 3 : Le georgisme et l’économie sociale
Le georgisme, inspiré des idées d’Henry George, repose sur l’idée que la valeur du sol doit être captée pour le bien commun plutôt que privatisée. Ce courant de pensée s’inscrit dans une réflexion plus large sur la justice économique, la propriété et la redistribution des richesses.
Fiscalité foncière et autonomie locale : comment une taxation foncière inspirée du georgisme pourrait-elle être un levier pour financer les initiatives locales et renforcer la justice économique ?
Territoires et coopératives foncières : quels dispositifs inspirés du georgisme peuvent être utilisés pour démocratiser l’accès à la terre et empêcher la spéculation immobilière ?
Synergies entre georgisme et économie sociale et solidaire : dans quelle mesure l’idée d’une rente foncière redistribuée rejoint-elle les objectifs du mutuellisme et des coopératives ?
L’intégration du georgisme dans la gouvernance territoriale et l’économie sociale ouvre ainsi des perspectives nouvelles pour concilier justice économique, démocratie locale et coopération.
Travaux au sein de cet axe : Nathanaël Colin-Jaeger, 2024, "Diviser pour mieux gouverner : en défense des fédérations polycentriques", Revue Philosophique de la France et de l’Etranger, 149(4) : 475-498.
Nathanaël Colin-Jaeger, 2024, "La nature de la Fédération : ontologie et caractéristiques normatives", ImplicationsPhilosophiques, https://www.implications-philosophiques.org/compte-rendu-critique-le-pacte-la-federation-et-sur-lunion-europeenne/.
Pôle 2 : Éthique et vulnérabilité dans les champs professionnels de l’action sociale et solidaire
Responsable : Marie-Claire Willems
Les deux pôles du laboratoire de la FLEPES s’articulent autour d’une même dynamique d’analyse des faits d’autonomisation et de participation, mais selon des perspectives complémentaires. Le premier pôle explore l’autonomisation des individus au sein des organisations collectives, en interrogeant les cadres démocratiques qui régissent la liberté d’association, l’économie sociale et la gouvernance territoriale. Le second pôle, quant à lui, transpose cette réflexion aux acteurs et actrices du champ professionnel de l’action sociale et solidaire. Il s’intéresse à la manière dont les actrices et acteurs de ces secteurs accompagnent l’autonomisation des personnes et favorisent leur participation sur les territoires, dans un contexte marqué par d’importantes mutations autant socioéconomiques que du secteur professionnel.
L’individualisation, les mutations du travail, l’accroissement des risques et la transformation des formes de domination contribuent à de nouveaux modes de fragilité. Phénomène complexe, la vulnérabilité résulte de transformations profondes des structures sociales, économiques et politiques dans une société postmoderne. Elle ne se limite pas à la précarité économique, mais touche également les liens sociaux, familiaux et professionnels. En cela, les champs de l’action sociale et solidaire n'échappent pas à ces réalités.
Axe 1 : Lien Social et études des vulnérabilités
Le premier axe s’intéresse aux processus de vulnérabilisation dans la construction du lien social mis au cœur des pratiques d’accompagnement et de construction de projets solidaires.
Vulnérabilité et subjectivation : comment les expériences de précarité et d’exclusion sociale influencent-elles la construction du sujet et ses possibilités d’agir ? Comment les professionnel.les du travail social et de l’ESS anticipent et accompagnent, par une logique de médiation et de prévention, la reconnaissance des vulnérabilités et subjectivités?
Pratiques professionnelles et réflexivité : comment intégrer une approche réflexive dans l’action sociale et solidaire ? Quelles coopérations entre les professionnel.les et les personnes accompagnées, entre les institutions et les politiques publiques pour une pratique du changement, de justice sociale et de luttes contre les exclusions et les discriminations ?
Travaux au sein de cet axe : Marie-Claire Willems, 2023, Musulman. Une assignation?, Éditions du Détour, Paris.
Axe 2 : Éthique et transformation des pratiques professionnelles en intervention sociale et solidaire
Dans un contexte où l’action sociale et solidaire favorise de nouvelles formes de participation des personnes accompagnées, la réflexivité semble nécessaire pour penser les postures professionnelles. Ce second axe interroge donc les “dilemmes” éthiques liés aux champs professionnels.
Éthique, reconnaissance et identité : comment les compositions/recompositions de l’identification sociale interrogent-elles les pratiques professionnelles et les projets solidaires ? Le fait socioreligieux sera ici privilégié, mais aussi les diverses formes d’identités racisées et ethnicisées qui peuvent venir faire conflit sur le terrain et dans l’espace public.
Éthiques et régulation des pratiques professionnelles : comment l’autonomie et la reconnaissance des pouvoirs d’agir des publics accompagnés pose de nouveaux enjeux éthiques dans un contexte grandissant de précarité et de vulnérabilité sociale ? Comment la co-construction des savoirs enrichit-elle l’accompagnement social et la création de nouveaux projets solidaires ? Comment influence-t-elle la formation des apprenant.es dans le secteur solidaire et social ?
Ethique et publics vulnérables : quels dispositifs et méthodologies permettent d’expérimenter et d’adapter les pratiques d’accompagnement des publics vulnérables et les problématiques territoriales. Comment favoriser des approches inclusives et adaptées aux réalités du terrain et aux changements
sociaux ?
Travaux au sein de cet axe : Simona Tersigni, Claire Vincent-Mory, Marie-Claire Willems (Dir.), 2019, Appartenances in-désirables. Le religieux au prisme de l’ethnicisation et de la racisation, Éditions Pétra, Collection IntersectionS, Paris
Magali Bessone, Alexis Cukier, Christian Lazzeri, Marie-Claire Willems (Dir.), « Identités et catégorisations sociales », Terrains/Théories [En ligne], 3 | 2015.
Participation rapport collectif, « La pratique de l’islam dans le champ professionnel : éthique, religion et citoyennetés », dirigée par Bochra Kammarti, EHESS, Cespra.
Axe 3 : Recherche-action et co-construction des savoirs
Ce dernier axe prolonge la réflexion sur les formes de coopération sociale, d’accompagnement et de gouvernance des dispositifs solidaires, en interrogeant comment se produisent et se valorisent des savoirs spécifiques. Il permet d’intégrer les questionnements éthiques liés à la reconnaissance des savoirs d’expérience et aux processus de subjectivité des publics vulnérables dans le champ du travail social et de l’économie solidaire.
Participation des publics et ancrage territorial : en quoi la recherche-action peut-elle renforcer l’implication des personnes accompagnées dans la conception des dispositifs sociaux et solidaires ? Comment saisir les initiatives solidaires et sociales issues du terrain et leur rapport aux politiques publiques et modèles de gouvernance ?
Institutionnalisation et transmission des savoirs : quels leviers permettent de reconnaître et d’institutionnaliser les savoirs d’expérience et les acquis professionnels dans le travail social et l’ESS ? Comment assurer leur intégration dans la formation et l’évolution des pratiques professionnelles ?
Travaux au sein de cet axe : Camille Chamois, Marie-Claire Willems (Dir.), « Pratiques croisées en philosophie et sociologie », Terrains/Théories n°11/2020.
Objectif transversal aux deux pôles : Mise en Réseau des Chercheuses et chercheurs, des Praticien·nes et des Institutions
La FLEPES entend développer des partenariats et des collaborations avec d’autres centres de recherche, de manière ponctuelle (pour des ateliers, des conférences, des séminaires), ou approfondie (pour des formations, des collaborations thématiques). La FLEPES se connecte également avec un réseau constitué d’associations et d’actrices et acteurs dans le champ social et solidaire.